Nous abordons ici ce qui est en principe une mauvaise pratique de la traduction, mais qui s’avère un mal nécessaire.
Une langue-pivot est une langue supplémentaire, un intermédiaire par rapport à une traduction « normale », pour laquelle on traduit le texte en langue « a » directement dans un texte en langue « b ».
Ainsi, il s’agit du procédé où « a » sera traduit en « x » ; « x » étant ensuite traduit en « b ».
Pourquoi s’agit-il d’une mauvaise pratique ?
Les biais de compréhension sont potentiellement multiples entre l’auteur, le traducteur et le lecteur d’un même texte. Il suffit de signaler qu’entre ce que l’auteur pense, puis rédige, entre ce que le traducteur comprend, puis retranscrit dans la langue cible et ce que va comprendre le lecteur, pour s’apercevoir du danger qu’il y a à rajouter un filtre supplémentaire.
Néanmoins, il est parfois impératif d’en passer par là.
Pour des questions de compétences en premier lieu.
Imaginons d’abord le cas le plus extrême en théorie : un projet nécessitant une traduction dans une combinaison directe de langue pour laquelle il n’existerait pas de traducteur de niveau professionnel. Cela pourrait être possible pour des pays très éloignés géographiquement, culturellement et n’entretenant que fort peu de relations commerciales.
Quand bien même il existerait au moins un ou quelques traducteurs pour ces combinaisons linguistiques extraordinairement rares, il est encore possible que le projet concerné porte sur un domaine pour lequel ce(s) traducteur(s) ne sont pas compétents (ou indisponibles).
Pour des questions de volume et de délais enfin.
Dans le cas de textes très volumineux devant être traduits dans un délai des plus courts, il est paradoxalement plus efficace de traduire dans un premier temps un texte source dont la langue est rare dans une langue différente de la langue cible. En effet, la capacité de travail des traducteurs « directs » peut être surpassée par des traducteurs dans une autre langue, bien plus nombreux. Cette langue intermédiaire doit donc être une combinaison singulièrement plus courante avec la langue source et la langue cible, respectivement. En effet il s’agit malgré tout d’un cas-limite, plus proche en réalité de l’absence de traducteurs compétents pour cette combinaison ou ce domaine de spécialité.
L’anglais est actuellement la langue-pivot par excellence, du fait de son implantation géographique sur plusieurs continents et de sa prééminence économique, diplomatique et culturelle ; il est fort probable que toute traduction « exotique » puisse être résolue en passant par l’anglais.